Archivistes

Après la visite d’un datacenter en 2022, les membres de l’AAFB ont été invités à découvrir les Archives nationales du Luxembourg lors de la visite thématique annuelle ce 25 septembre. Ce n’est pas moins de dix-neuf membres, issus tant des archives privées que publiques, qui ont répondu présents. Ce fut également une belle opportunité pour l’AAFB d’en apprendre davantage sur l’organisation de la gestion et préservation de l’information au-delà des frontières à l’occasion de la finalisation de son cahier de revendications, à l’aube des élections du 9 juin 2024.

Situées au plateau du Saint-Esprit, les Archives nationales du Luxembourg ont investi l’ancienne Caserne de la compagnie des volontaires en 1968. Au fil des années, pour augmenter la capacité de stockage, plusieurs dépôts répartis aux quatre coins de la ville ont été aménagés : un dépôt situé auprès du nouvel Hôtel des Postes à Luxembourg-Gare, un autre dans une partie du parking souterrain du Plateau du Saint Esprit, un dans la zone industrielle de Bourmicht à Bertrange et également, à partir de 2017, un dépôt dans les sous-sols de l’Athénée de Luxembourg. Ces différents lieux de stockage rendent plus complexe le travail des collaborateurs pour la gestion et la consultation des 50 km d’archives conservées. La construction d’un nouveau bâtiment, prévue à Esch-Belval, et le déménagement futur répondra à ces différentes difficultés.

Avant d’entamer la visite des locaux, nous avons été accueillis par Josée Kirps, directrice des Archives nationales du Luxembourg et présidente de l’ICA qui a rappelé l’importance de la collaboration entre les archivistes et gestionnaires de l’information ainsi que le rôle majeur des associations professionnelles.

De droite à gauche : Claude de Moreau de Gerbehaye, Marie Laurence Dubois, anciens présidents de l’AAFB, Josée Kirps, directrice des Archives nationales du Luxembourg et présidente de l’ICA, Corinne Schroeder, présidente du VLA et Florian Delabie, président de l’AAFB

En matinée, guidés par Sanja Simic, responsable du service Communication et du Service pédagogique, nous avons pu découvrir assez rapidement l’exposition temporaire : « 1848 – Revolutioun zu Lëtzebuerg » évoquant les troubles de mars 1848 et leur influence dans le Grand-Duché de Luxembourg. Nous avons ensuite été emmenés dans les différents magasins d’archives du bâtiment principal. Traversant le couloir dit des notaires, nous y avons découvert de part et d’autre un type de fonds d’archives conservés par les Archives nationales : les minutes notariales dont les plus anciennes remontent à 1606 . Nous nous sommes ensuite dirigés vers les archives des cours et justice où nous avons pu découvrir différents documents racontant le procès d’un meunier en 1820-1821, qui fut le dernier condamné à mort par guillotine au Luxembourg. Nous nous sommes également attardés autour des cartes et plans conservés et fait un passage dans la préserve précieuse. Tout au long des échanges et des explications données, nous comprenons que l’adoption de la loi de 2018 sur l’archivage est une véritable opportunité et permet une meilleure reconnaissance du métier : un service « conseil, collecte et encadrement » a vu le jour pour répondre aux nouvelles missions des archives nationales ainsi qu’une augmentation notable du personnel.

Après un petit repas bien mérité, nous avons eu l’occasion de discuter et d’échanger avec les archivistes des Archives nationales sur l’organisation des archives publiques au Luxembourg et plus précisément sur la législation des archives. Avec beaucoup d’intérêt de la part de nos membres, nos discussions se sont majoritairement centrées sur la loi du 17 août 2018 relative à l’archivage[1]. Parmi une des plus récentes des pays européens, cette loi permet une meilleure gestion de l’information et des archives au niveau national. Jusqu’en 2018, il n’existait pratiquement rien concernant l’encadrement des archives publiques si ce n’est la loi sur les établissements culturels de 2004, dont fait partie les Archives nationales. Les premières réflexions autour de la loi archives remontent en 2011 et après plusieurs versions et adaptions, donnent un texte de compromis entre les producteurs et les archivistes. Cette loi fixe et définit plusieurs points : l’obligation de versement pour les institutions publiques ainsi que les modalités de versement, la mission de conseil des Archives nationales pour les différents producteurs, la création du conseil des archives (organe de réflexion entre producteurs, archivistes, associations professionnels, université et chercheurs servant de lieu de réaction et de conseil pour toutes les questions relatif aux archives), la fixation de tableaux de tri, les durées de conservation, la désignation de délégués à l’archivage au sein de l’administration, etc. Malgré quelques points négatifs mis avant par les archivistes luxembourgeois, la promulgation de cette loi a été une avancée pour le secteur : clarification de certains points juridiques, ouvertures de postes dans le pays, etc. Par exemple, 93 ministères ont recruté ou nommé une personne au poste de délégué à l’archivage. Cependant, les archivistes luxembourgeois souhaiteraient aller plus loin pour améliorer le cadre législatif et éclaircir certaines zones d’ombre : définition des producteurs archives publiques ; déclassification des archives ; délais de communication parfois trop long ou difficile à appliquer, etc.

Nous avons pu également aborder l’archivage électronique. De manière volontaire, la loi de 2018 ne fait aucune distinction de support et englobe bien évidemment les données électroniques. Plusieurs versements d’archives électroniques ont déjà été opérés aux archives nationales. C’est évidemment une manière différente de les gérer surtout au niveau du risque autour de la pérennité du support. La construction du futur bâtiment des archives nationales, les inondations de 2018 ainsi que les plans d’urgences ont également été évoqué. Au niveau des archives nationale, il n’y a pas de plan formalisé mais il existe un réseau et différentes mesures d’urgences. Il y a notamment la volonté d’établir un plan d’urgence l’échelle nationale pour les institutions culturelles fédérales afin de permettre la mutualisation des ressources.

Dès 16h, deux membres du comité de la VLA, association des archivistes du Luxembourg ont rejoint les membres de l’AAFB afin de poursuivre le partage d’expérience. Corinne Schroeder, présidente du VLA et Christian Lekl, secrétaire, ont présenté l’organisation interne de l’association en passant par les missions, le profil des membres. Jeune asbl qui fêtera ses dix ans en 2024, le VLA a des missions similaires à l’AAFB : valorisation de la profession et du secteur, fédération des archivistes et professionnalisation du secteur. Les visions du secteur et des activités pour celui-ci ont pu être partagées entre les associations : formations, GT, etc.

Au termes cette journée, les membres de l’AAFB ont pu découvrir la réalité archivistique luxembourgeoise et nous avons pu faire un partage d’expérience autour de diverses thématiques. Nous remercions l’ensemble de l’équipe des Archives nationales pour leur accueil chaleureux et leur partage d’expérience ainsi que le VLA pour les échanges constructifs. Un premier pont a ainsi été érigé dans le cadre d’une future collaboration, en espérant que celle-ci soit fructueuse.


[1] https://legilux.public.lu/eli/etat/leg/loi/2018/08/17/a706/jo